Le 17 octobre 2025 marque les 20 ans de René Trépanier à la tête de Croisières du Saint-Laurent. Une carrière guidée par une passion indéfectible pour le fleuve, et une capacité unique à transmettre cette passion à tous ceux et celles qu’il croise.
Le fleuve comme fil conducteur
Avant les croisières, il y avait déjà le fleuve. René commence sa carrière en 1984 comme naturaliste pour le Service canadien de la faune, interprétant les oies blanches à la réserve du Cap Tourmente. Puis, direction la Gaspésie, où il travaille au parc de l’île Bonaventure et du Rocher Percé, toujours en lien avec les oiseaux marins.
« Mon dénominateur commun, c’est le fleuve. »
En 1985, il fonde le Centre d’interprétation du saumon atlantique, qu’il dirige pendant dix ans. Consultant, promoteur de la Gaspésie, puis instigateur du Québec maritime, René devient un ambassadeur du Saint-Laurent sur les marchés internationaux.
L’appel des croisières
En 2005, un chasseur de tête l’approche : on cherche quelqu’un pour parler des croisières sur le Saint-Laurent. René accepte, sans jamais avoir fait de croisière.
« Ma job, c’était de promouvoir le Saint-Laurent. Je continuais de faire ce que je faisais, mais avec une clientèle différente. En entrevue on m’a demandé si je trouvais que c’était un gros défi de développer un réseau dans les croisières. J’ai répondu : il y a 50 compagnies, il faut que je me fasse 2 chums par compagnie, un réseau de 100 personnes. Ça va être facile! »
René n’avait peut-être pas d’expérience dans les croisières, mais développer un réseau de contact, ça oui! Il met en place une stratégie ciblée, courtise les compagnies, participe à des salons, organise des tournées de familiarisation. Et surtout, il mise sur le concept de harcèlement sympathique.
« C’était pour faire sourire les clients, leur rappeler qu’on était là. »
Des confitures aux saveurs régionales, des boules de Noël soufflées à la main, des cartes chantées… chaque cadeau est pensé pour marquer les esprits. Une formule qui s’est avérée gagnante au fil du temps.
« On a innové avec nos façons de faire. On s’est associé avec les partenaires de Canada Nouvelle-Angleterre pour avoir une meilleure pénétration sur le marché. On a toujours maintenu la recette : rencontrer, participer aux salons, faire des tournées de familiarisation, mettre en place le Symposium. La recette a super bien fonctionné. On est passé de 100 000 passagers il y a 20 ans à environ 400 000 aujourd’hui. »
Des moments marquants
Parmi les événements marquants, René cite les symposiums organisés au Québec (2000 : Montréal; 2003 : Québec; 2006 : Montréal; 2009 : Saguenay; 2012 : Québec; 2017 : Montréal; 2023 : Québec) – avec un attachement particulier à celui de Saguenay, premier symposium organisé en dehors des grands centres - ainsi que les tournées de familiarisation. Mais une anecdote ressort du lot : l’histoire du castor.

Lors d’une tournée, devant un public anglophone, René mime et raconte comment on rase un castor… sans savoir que « beaver » a une connotation bien particulière en anglais. L’histoire devient virale, reprise dans les conférences, les repas, et même lors de la remise d’un prix aux États-Unis.
« Ça s’est mis à rire, mais de façon démesurée! Je me dis : je suis donc bien drôle! Donc, je rajoute des détails… Jusqu’à ce qu’on m’explique le lendemain la connotation de « beaver » en anglais. Je me suis mis à avoir chaud! J’ai raconté cette histoire au moins 150 fois. »
La croisière hivernale : un rêve devenu réalité
Après dix ans de travail acharné, René voit enfin naître, en janvier 2025, les premières croisières hivernales sur le Saint-Laurent. Il raconte comment, après une discussion avec Priscilla Nemey de l’escale de Saguenay, il s’est mis à rêver de croisières en hiver sur le Saint-Laurent. Après trois tournées de familiarisation en 10 ans, un ralentissement causé par la pandémie, la compagnie Ponant accepte d’être pionnière de cette aventure hivernale. Il parle avec émotion de cette expérience, de la complicité à bord, de la fierté de voir les escales livrer une expérience de qualité, et de la portée médiatique internationale.
« J’avais l’impression d’être un explorateur. C’était un immense privilège. »

Le virage durable : une nécessité devenue vision
La pandémie a marqué un temps d’arrêt, mais aussi un tournant pour Croisières du Saint-Laurent. Sous l’impulsion de René Trépanier et de son équipe, l’organisation a adopté une stratégie de développement durable ambitieuse, consciente que l’avenir du fleuve dépend de notre capacité à le protéger.
« On ne peut pas avoir des objectifs seulement économiques. Le Saint-Laurent est un milieu fragile. »
René insiste : le fleuve est un plan d’eau intérieur, unique au monde, et donc particulièrement vulnérable. Il ne suffit pas de respecter les réglementations environnementales — il faut les promouvoir, les incarner, et surtout les faire comprendre à tous les partenaires.
« Notre stratégie a permis d’attacher des ficelles entre tous les partenaires, de vendre une vision commune avec des orientations sur cinq ans. »
Ce virage a transformé la culture de l’organisation. Les escales, les partenaires, les intervenants locaux : tous ont été sensibilisés, mieux outillés, et engagés dans une démarche collective. La stratégie a aussi permis de structurer le dialogue, de créer des mécanismes de communication pour que chacun puisse comprendre son rôle dans cette industrie à fort impact.
« On compose avec un partenaire sur lequel on n’a pas de contrôle : les compagnies de croisières. On doit absolument être vigilants comme destination. »
René rêve d’un avenir où le Saint-Laurent ne sera plus simplement une destination ouverte à tous, mais un territoire protégé, où l’accès se mérite par l’engagement envers l’environnement.
« Ne viendra pas dans le Saint-Laurent qui veut. »
Et demain?
René souhaite un Saint-Laurent encore plus vivant, avec des croisières fluviales, des ports niches, et une organisation globale qui dépasse le cadre des croisières.
« Le Saint-Laurent appartient à beaucoup d’autres joueurs. Il devrait y avoir une sectorielle du fleuve pour en prendre soin. »
Un homme, une passion
René conclut avec humilité et générosité :
« J’ai transmis ma passion du fleuve à des clients étrangers, mais j’ai surtout rencontré des passionnés comme moi. Une passion, si tu ne peux pas la partager, ça ne veut rien dire. »
Il tient d’ailleurs à remercier son équipe et le conseil d'administration, présents et passés, formés de personnes qui ont partagé sa passion et ont rendu possible le développement de la destination.
